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Dépassements d’honoraires à l’Hôpital public

19 janvier 2017

Paris, le 18 janvier 2017

Dépassements d’honoraires à l’hôpital : un pas en avant, deux pas en arrière !

Dans le genre « j’y vais, je n’y vais pas », le dossier des dépassements d’honoraire à l’hôpital fait figure de référence. Autant de gloses, de commentaires catastrophistes, d’hésitations et de rétropédalage sur un dossier aussi problématique pourraient prêter à sourire s’il ne s’agissait pas de compromettre l’égalité d’accès aux soins.

La dernière loi de santé laissait présager la fin des dépassements à l’hôpital public

Pour rappel, la loi de modernisation du système de santé de janvier 2016 (article L. 6112-2 du code de la santé publique) prévoit que les établissements de santé assurant le service public hospitalier (hôpitaux publics et cliniques privées assurant des missions de service public) et les professionnels de santé qui exercent en leur sein garantissent à toute personne qui recourt à leurs services l’absence de facturation de dépassements d’honoraires.

Dès lors, il était explicitement interdit à tout médecin exerçant au sein d’un établissement de santé assurant le service public hospitalier de facturer des dépassements d’honoraires dans le cadre de son activité libérale. Interdiction confirmée par l’interprétation de nombreux juristes suite à l’avis du Conseil Constitutionnel au moment de l’adoption de la loi.

Les associations d’usagers se sont félicitées de cette avancée en faveur de l’égalité de traitement qui abolissait une aberration difficile à justifier sauf à supposer que les établissements de santé gagnent à ce que les médecins facturent des dépassements d’honoraires… Néanmoins, la loi est passée sans que les pratiques ne changent, et les dépassements ont continué leur progression dans le cadre de l’activité libérale à l’hôpital.

Une récente ordonnance vient rétablir les dépassements à l’hôpital public, mais pas dans les cliniques privées participant aux missions de service public

Nous attendions un rappel à la loi mais « Patatra ! », une ordonnance du 13 janvier 2017 est venue corriger le texte de loi pour y introduire une dérogation en faveur des praticiens statutaires à temps plein exerçant au sein des établissements publics de santé. Ce faisant, les praticiens exerçant à l’hôpital public pourront ainsi officiellement continuer de facturer des dépassements d’honoraire au sein de l’activité libérale qu’ils pratiquent dans ses murs, tandis que les médecins officiant dans les cliniques privées en charge de mission de service public ne le pourraient plus. Logique ? Non. Ubuesque. Discriminatoire. Inexplicable.

Et cette ordonnance est d’autant plus étonnante que le Gouvernement l’a prise sur le fondement d’une habilitation législative dont l’objectif est de permettre des « mesures relevant du domaine de la loi visant à assurer la cohérence des textes au regard des dispositions » de la loi de modernisation de notre système de santé. Or, en l’occurrence, cette mesure corrective est contraire à l’esprit du Législateur. Elle outrepasse le cadre strict de l’habilitation législative et elle participe de l’inintelligibilité des coûts de soins.

Tout cela pour satisfaire les intérêts d’une extrême minorité de praticiens hospitaliers, les quelque 1.900 exerçant en secteur 2 à l’hôpital :
-  soit environ 43% des 4 500 praticiens hospitaliers y pratiquant une activité libérale, 57% l’exerçant déjà sans effectuer de dépassements d’honoraires ;
-  et surtout, seulement 4% de l’ensemble des quelque 40.000 praticiens hospitaliers qui sont une grande majorité à n’avoir aucune activité privée au sein de l’hôpital public.

Que craignait-on à assumer une disposition législative interdisant les dépassements d’honoraires dans les établissements assurant le service public hospitalier ? Le courroux d’une poignée de « médecins stars » qui proposent des réductions de délais d’attente et leur expertise en échange de prix souvent très élevés, en menaçant de quitter leurs responsabilités au sein du système hospitalier public si on les en empêche ? La contestation des établissements de santé qui ont l’air de s’accommoder de ces pratiques qui leur rapportent ? En tout état de cause, c’est l’indignation du côté des usagers.

Le CISS s’oppose à la ratification de cette ordonnance qui vient contredire une disposition législative votée et applicable depuis le 26 janvier 2016. La fin des dépassements d’honoraires est un objectif ambitieux. Celui de les interdire dans les établissements de santé assurant des missions de service public l’était moins mais à portée de main. Revenir sur cette interdiction, dans de telles conditions, c’est faire insulte au processus démocratique. On ne peut pas, en outre, d’un côté se louer d’avoir réintroduit un service public hospitalier fort porté par de solides principes de solidarité et d’égalité, et de l’autre permettre une dérogation à l’un de ces principes au détour d’une ordonnance !

Contact presse :
Marc Paris – Responsable communication – Tél. : 01 40 56 94 42 / 06 18 13 66 95

Claude Rambaud

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